Jeudi 20 janvier 2011 à 2:16

 Per me si va ne la città dolente,

Per me si va ne l’etterno dolore,

Per me si va tra la perduta gente.

Giustizia mosse il mio alto fattore ;

Fecemi la divina podestate,

La somma sapïenza e’l primo amore.

Dinanzi a me non fuor cose create

Se non etterne, e io etterno duro.

Lasciate ogne sperenza, voi ch’intrate.

 

Par moi on va dans la cité dolente,

Par moi on va dans l’éternelle douleur,

Par moi on va parmi la gent perdue.

Justice a mû mon sublime artisan,

Puissance divine m’a faite,

Et la haute sagesse et le premier amour.

Avant moi, rien n’a jamais été crée

Qui ne soit éternel, et moi je dure éternellement.

Vous qui entrez laissez toute espérance

 

Dante, La Divine Comédie, l’Enfer, chant III, 1-9

 

L’inscription de la porte de l’enfer

 

http://college-de-vevey.vd.ch/auteur/livres/connaissance/tomeVIII/rodin/porte-enfer.jpg

Dont on trouve ici la matérialisation pour Auguste Rodin

 

Qui s’avère avoir eu pour fan… Aleister Crowley.

 

Ça me transcende 

Jeudi 13 septembre 2007 à 2:20

Toutes les bonnes choses ayant une fin, la saison médiévale est terminée pour moi. J'aimerais faire un florilège du meilleur du pire entendu sur le campement, mais il me faudrait alors tout relater. néanmoins je garde ce projet sous le coude, histoire que nous n'oublions pas dans quels abysses peuvent sombrer les meilleurs d'entre nous. Il est néanmoins bon de s'y plonger parfois!

et voilà qu'à l'horizon se profilent des angoisses et des soucis, et des interrogations, auxquelles il me faudra impérativement répondre. Il ne me faudra pas garder le silence tel Perceval devant le cortège du Graal.

en invoquant un être aimé, le but de cet article était de faire partager une exaltation du moment. me voici plongée avec délice dans l'oeuvre d'un de mes maîtres, dont j'ai déjà souvent invoqué amoureusement le nom (ça me rappelle un dialogue dans le Nom de la Rose: "Avez vous déjà été amoureux, Maître?" "oh oui, très souvent! Aristote, Ovide, Virgile...") oui, car je parle du très aimé Virgile. Son Enéide, quoi que l'on puisse en dire qu'elle est une oeuvre de propagande, ne recèle pas moins des trésors sans fin du talent innefable du poète. Mon âme vibre en ne lisant rien que la traduction. Pour avoir étudié l'oeuvre en latin (et avoir eu une excellente note en tombant sur un de ses textes au bac) je sais comme l'original est ô combien plus beau et émouvant. C'est pourquoi je tenais (il en aura fallu du temps pour arriver au sujet de l'article) à mettre ici un passage qui m'a particulièrement bouleversée, la fin du chant IV, la mort de Didon, vers 682 à 705

petit résumé pour ceux qui ignorent toute l'histoire, et pour situer le passage lui même: Enée a fui Troie envahie par ruse par les grecs sur ordre des dieux, afin de refonder sa ville en Italie. après diverses pérégrinations et tempète, il arrive à Carthage où la reine Didon s'amourache de lui. Quoique attaché à son amante, Enée est rappelé à l'ordre par les dieux et doit partir sans tarder. Le désespoir et le courroux de Didon sont immenses. Après avoir maudit les Troyens (malédiction qui s'accomplira avec les guerres Puniques bien plus tard) elle se suicide sur le bûcher qu'elle avait demandé à sa soeur Anna de dresser, prétextant y faire brûler tous les souvenirs liés à Enée. Elle  s'enfonce dans le coeur une arme laissée par Enée, s'effondrant dans le lit "où elle s'est perdue". Sa soeur arrive à ce moment et maudit son manque de discernement.

‘exstinxti te meque, soror, populumque patresque
Sidonios urbemque tuam. date, uulnera lymphis
abluam et, extremus si quis super halitus errat,
ore legam.' sic fata gradus euaserat altos,               
semianimemque sinu germanam amplexa fouebat
cum gemitu atque atros siccabat ueste cruores.
illa grauis oculos conata attollere rursus
deficit; infixum stridit sub pectore uulnus.
ter sese attollens cubitoque adnixa leuauit,               
ter reuoluta toro est oculisque errantibus alto
quaesiuit caelo lucem ingemuitque reperta.

 

Tum Iuno omnipotens longum miserata dolorem
difficilisque obitus Irim demisit Olympo
quae luctantem animam nexosque resolueret artus.    
nam quia nec fato merita nec morte peribat,
sed misera ante diem subitoque accensa furore,
nondum illi flauum Proserpina uertice crinem
abstulerat Stygioque caput damnauerat Orco.
ergo Iris croceis per caelum roscida pennis              
mille trahens uarios aduerso sole colores
deuolat et supra caput astitit. 'hunc ego Diti
sacrum iussa fero teque isto corpore soluo':
sic ait et dextra crinem secat, omnis et una

dilapsus calor atque in uentos uita    recessit.    

 


 ‘O ma sœur, tu nous as anéanti, toi, moi, ton peuple, ton sénat

 

 

 

Et ta ville de Sidon. Donnez, que sa blessure, d'une onde pure,

 

Je lave, et, si un dernier souffle erre encore sur ses lèvres,

 

Que je le recueille d'un baiser.' En disant ces mots, elle est arrivée en haut des marches

Elle serrait dans ses bras sa sœur à demi-morte, la réchauffait contre elle,

 

En gémissant, avec sa robe, elle épanchait les sombres flots de sang.

 

Didon essaie de lever ses paupières alourdies et de nouveau

S'évanouit ; le sang s'échappe avec un sifflement du fond de sa poitrine.

 

Trois fois elle s'est redressée en s'appuyant sur le coude ;

 

Trois fois elle est retombée et ses yeux égarés, levés là-haut

 

Ont cherchés la lumière du ciel, et elle a gémi de l'avoir trouvé.

 

Alors la toute puissante Junon, ayant pitié de sa longue souffrance et de sa fin pénible

A dépêché Iris du haut de l'Olympe

 

Pour qu'elle déliât cette âme qui se débattait dans les liens de ses membres

 

Car comme sa mort n'était l'effet ni de la nécessité, ni d'un châtiment mérité,

 

Mais que l'infortunée succombait avant le temps,

 

Proserpine n'avait ni enlevé de son front le cheveu doré

 

Ni dévoué sa tête au dieu des Enfers.

 

Ainsi donc iris déployant par le ciel ses ailes de safran humides de rosée

 

Prenant face au soleil mille couleurs variées,

 

Descend et s'arrête au chevet de Didon : « j'emporte, moi,

 

Ce cheveu qui appartient à Pluton et te délie de ton corps »

 

Elle dit et  de sa main coupe le cheveu.

 

 Aussitôt toute la chaleur s'est dissipée,  et le souffle de vie s'en est allé dans les airs

 

 

 

Pour illustrer la mort de Didon, une toile homonyme de Rubens, datant de 1577.

comme quoi au XVIeme j'aurais été un canon de beauté...

 

 Voilà, je suis restée pantoise de longs instants après avoir lu cela...

Je vais en profiter pour éclaircir un peu certains passages un peu obscurs concernant les rituels funéraires romains.

Il était de coutume de receuillir le dernier souffle des mourants par un baiser. ce rituel, que je trouve très beau, je l'interprète comme une volonté de conserver en soi une part du defunt...

Est également mentionné ici la consécration d'une mèche de cheveux du défunt à Pluton, ici nommé Orcus, comme offrande. C'est normalement Proserpine elle même qui se charge de ce rituel, mais seulement lorsque l'heure à laquelle l'on trépasse était celle impartie. Si une personne meurt avant terme, Proserpine ne peut s'en charger. le suicide de Didon fait partie de ces morts prématurée, et l'absence de la déesse explique que la reine peine à mourir, d'où l'intervention de la messagère des dieux, Iris, envoyée par Junon, responsable de l'amour de Didon pour Enée.

Voilà en quoi j'admire aussi la mort de Didon: son suicide n'avait pas été prévu par les dieux, qui manigance tout et manipulent les hommes suivant leur bon plaisir. Elle affirme, quelque part, sa liberté.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mardi 26 juin 2007 à 3:25

Est-il possible d'aimer autant deux poètes morts? o_0

pas tout à fait (morts, s'entend)

Quant au titre... j'aime ce terme. le dédoublement du héros reflétant deux aspects de lui même. On a vu que Dante et Virgile en faisaient partie. Serais-je obsédée? 

Mais il y a aussi Faust et Méphistophélès! J'aimerais avoir l'oeuvre en bilingue... pour pouvoir accéder au plus près à l'univers de Goethe, à son esprit.

ça y est, c'est reparti dans mes fanstasmes de nécrophilie spirituelle sur des poètes décédés   >_<

Et c'est une véritable honte je ne connaissais pas le Second Faust! Il me le faut!

comme ça en plus je comprendrais sans doute mieux ce que chante notre camelot.

On ne peut aborder un thème romantique sans croiser Maître Delacroix, que j'aime aussi avec fougue (décidément est ce qu'il faut être mort pour me plaire?? T_T) Voici donc sa vision de Faust et de Méphistophélès.

Il faudrait que je réfrène mon exaltation. Parce que Delacroix + Faust = quasi arrêt cardiaque de bonheur.

 

Aller on achève! comment occuper/ perdre son temps en vacances

ici (beware of Inquisitive content)

(beware of zoophilia content: dédicacé à mon travlo préféré)

merci à messire de Vildieu pour m'avoir fait découvrir une nouvelle façon de me rendre inutile ^^

Mardi 26 juin 2007 à 2:56

 

Il n’est pas malaisé de pratiquer la magie, de la ressentir au fond de soi.
Il faut avoir une œuvre, celle qui fait accélérer les battements du cœur, ouvrir la porte vers un au-delà, tourner amoureusement les pages, les yeux pleins de merveilles, frôler le papier empreint de cette odeur des temps passés, s’imprégner… s’immerger…
Caresser du regard la projection pure de l’esprit de ceux qui nous ont ouvert leur monde, et y entrer, avec passion.
Parcourir ces phrases qui s’épanouissent en nous comme autant fleurs, piliers, marbres, étoiles, constituants cet ailleurs dont nous faisons partie, l’âme vibrant des Mots du Maître.
 Ils résonnent dans tout notre être, se distillent dans le sang en un torrent mélodique tumultueux qui, se déversant dans chaque veine, nous plonge dans un charme hors du temps, une torpeur mystique, un éveil cosmique.
Le cœur du Maître bat à nouveau, à la cadence sourde du nôtre, son souffle est sur nos lèvres pieuses… Qui peut dire qui revit à travers l’autre ? Celui qui lit et éveille son esprit, ou celui que nous invoquons à travers les éons, depuis les sphères où il réside, et qu’il nous fait entrevoir par ses Mots ?
Car il est des vers qui rendent immortels ceux qu’ils rongent, gravant leurs noms dans les astres du firmament, où ils brillent, et brilleront tant que quelqu’un, quelque part, invoquera leur nom et sentira son âme ravie par leurs Mots, depuis là-haut.
 
Nel mezzo del camin de nostra vita
Mi retrovai per una selva oscura,
Ché la diritta via era smarrita
Ahi quanto a dir quel era è cosa dura
Esta selva selvaggia e aspra e forte
Che nel pensier rinova la paura !
Tant’ è amara che poco è più morte…
 
Ducit amazonidum lunatis agmina peltis
Penthesilea furens mediisque in milibus ardet
Aurea subnectens excertae cingula mammae
Bellatrix, udetque viris concurrere virgo…
 
Mon nom sera oublié, car je fais partie du commun des mortels, aucun de mes mots n’accédera à la postérité, personne n’invoquera si piètre… et des mots, j’en manque, pour dire à quel point je les aime, quel sentiment merveilleux sourde en moi quand la magie opère, chaque fois…
http://lostsoulslair.cowblog.fr/images/DanteVirgile.jpg
Toujours mes deux amours, qui me font vivre à travers leur esprit, et qui vivent à travers mon souffle, au delà des siècles…
 
 

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