Dimanche 19 septembre 2010 à 7:00

Aujourd’hui, c’est la saint Perceval. Ne regardez pas sur le calendrier, c’est moi qui l’ai décidé. Parce que Perceval est pour moi un saint et qu’il mérite son jour à lui, et que ce jour particulier était tout indiqué.
 
http://www.timelessmyths.com/arthurian/gallery/parsifal.jpg
 
Vu que je n’ai pas vraiment le temps de m’épancher sur la question de qui il est et pourquoi je le révère, je ressors ce que j’avais écris dans un ancien article oublié, et qui explique très bien les choses.
 
Perceval, c’est avant tout pour moi un symbole, plus qu’un personnage de roman.
Comment expliquer ce qui me fascine autant chez lui ? beaucoup restent sur l'image du jeune gallois inculte faisant tout de travers, quand ils ne voient pas en lui le gros bêta (par ailleurs charmant) de la série bien connue diffusée sur m6. oh, non, Perceval est loin d'être bête, il suffit de faire un petit effort de lecture… j'ai entendu beaucoup de critiques sur lui… bien sûr au début c'est un ado un peu boulet, comme tous les ados, j'en connaît même beaucoup chez qui ça s'attarde dramatiquement. Voilà ce qui est très intéressant chez Perceval, c'est son évolution, c'est la façon dont il passe du statut de jeune ignorant turbulent à… chevalier célestiel. Car oui, c'est bien ce qu'il devient, c'est bien ce que Chrétien a voulu faire de lui, même s'il a disparu avant de pouvoir finir son œuvre… ce qui laisse un mystère fascinant, étant donné que chacun peut imaginer la suite à sa convenance, et beaucoup le firent, bien qu’ aucune version que j'ai lu ne me satisfasse.
Selon moi, et je ne suis pas la seule à le penser, Perceval, celui qui brise, est également celui qui restaure. Là où il sème d'abord le désordre, c'est pour mieux rétablir par la suite, instaurer un nouvel ordre. C'est ce que l'on peut voir avec l'épisode de l'Orgueilleux et de son amie, et d'après moi le reste suit le même schéma, et ainsi Perceval est-il celui voué à trouver ce Graal (et non pas cet insupportable Galaad) qu'il vit d'abord passer sans mot dire.
A ce propos, pour ceux qui le décrient là-dessus, c'était nécessaire. Perceval n'était pas encore initié, il n'était donc pas en mesure de dire les mots attendus. Et s'il avait parlé dès le début, la Quête n'aurait pu se faire, et sans Quête, pas de cheminement intérieur, tous les chevaliers seraient resté des chevaliers terrestres en attente de vaine gloire mondaine, au lieu de se chercher eux même… bon je sais tout cela est confus, mais Perceval est présenté comme le chevalier célestiel, (un Messie en quelque sorte) ce qu'il cherche n'est pas gloire mondaine, mais gloire céleste, qu'il ne peut trouver qu'en cheminant en lui même (le magnifique épisode des 3 gouttes de sang sur la neige sont un bon début)(ou pourquoi la neige me rend encore plus folle que de coutume) , et c'est pour cela que folie le frappe. Ce n'est qu'en se perdant que l'on peut trouver un tel chemin. Les saints les plus cotés sont ceux qui ont traversés une phase de folie par laquelle ils ont pu accéder au chemin du divin…(à vaincre sans péril on triomphe sans gloire) je ne vous fait pas un éloge de la folie (pour cela référez vous à Erasme) mais c'est un aspect important pour comprendre ce qui fait de Perceval un être si fascinant. Et c'est l'initiation…
Pas étonnant qu'il ait intéressé de près les… symbolistes. Et siiiii (rire satisfait et un brin sadique) oui il fallait que je les case ceux là, mais en même temps Perceval est l'icône la plus parfaite du symbolisme d'après moi. ^^
Pour résumer, il est l'incarnation du chevalier célestiel (si, ce mot existe par décret du roi, et le roi c'est moi), il est l'incarnation de l'être qui cherche en lui même pour atteindre le divin (et ça me fait penser à mon cours sur les religions romaines), qui cherche en lui même pour se trouver, tout simplement. Il est le jeune homme que folie doit frapper avant d'atteindre la sagesse, il est l'Initié, et bien plus que cela encore.
je ne puis résister à vous présenter une autre représentation que mon ami Jean Delville fit de lui :
http://lostsoulslair.cowblog.fr/images/DelvilleJeanParsifal.jpg
 
Aaah quelle beauté, quelle harmonie des formes et des couleurs, je ne sais pas, mais ce tableau dégage quelque chose qui me fait frissonner d'exaltation. C'est tout simplement rayonnant, comme cette lumière qui vient frapper le siège de ses pensées, avec cette chevelure d'or qui se confond avec le feuillage, et la lance ceinte d'un voile comme pour lui enlever son aspect guerrier, meurtrier, pour l'assimiler à la sacralité, même si la lance de Longinus est plutôt du ressort de Gauvain (tout l'inverse de Perceval… un homme qui n'évolue pas, un chevalier des vaines gloires mondaines qui ne cède pas à la folie pour le faire face aux frivolités qui le ridiculisent) et qu'elle lui obscurcit plutôt le visage… c'est de toute beauté… et non je ne me répète pas.
 
Je n’ai pas de dieu, pas de religion. Je suis fascinée en revanche par la conception de sacré et de divin, et je pense que c’est pourquoi j’aime tant les mythologies du monde entier. J’ai mes propres conceptions du sujet, ma mythologie personnelle, dont chaque objet n’est pas une entité divine à laquelle je voue un culte, mais un symbole de ma conception de la sacralité. Symbole, idée, idéal.
J’aimerais,  comme William Blake, pouvoir voir du divin dans chaque chose. J’aime d’ailleurs beaucoup ses pensées sur la question, car il me semble que sa mythologie est, comme je le recherche, avant tout comme ressortant du symbolisme.
L’objectif étant de voir plus loin, voir au-delà. Ouvrir ses yeux sur un ailleurs transcendant qui n’est peut-être que dans l’esprit, mais qui est.
Je crois que ça ne voudra rien dire pour personne, mais je me comprend, et c’est déjà pas mal.
 
Bonne fête à Perceval, donc. Bonne fête aux symbolistes, et à William Blake, tant qu’on y est.
Note en passant : je trouve ça assez curieux de m’intéresser au bouddhisme au moment même où mes passions son à leur paroxysme, quand le bouddhisme prône le renoncement des passions. En même temps, renoncer à ses passions demande déjà une immense passion. Passion, je le rappelle, c’est patior, la souffrance. Souffrir pour s’affranchir de la souffrance. Etre passionné pour annihiler la passion. Je trouve ça très intéressant. Le renoncement, c’est la transcendance de soi pour quelque chose de plus grand, c’est une forme suprême d’amour. Non ?
 
Et mes plus tendres pensées pour mon saint Graal, mon calice sacré aux lèvres duquel je bois la plus merveilleuse des expériences mystiques, dont la lumière m’irradie et me permet de voir, de ressentir et d’aimer au-delà.
 
 
 

Jeudi 11 mars 2010 à 1:06

 
...and says his prayers by night, may become a wolf when the wolf bane blooms and the autumn moon is bright
 
Une réplique très fameuse du film the Wolf Man, datant de 1941, et pas de 1946 comme je l’ai dit à l’article précédent, mais comme personne ne l’a lu je n’ai même pas à le relever.
Car aujourd’hui, on va profiter de la sortie du remake (heu, il est encore en projection depuis le temps ?) pour causer un peu loup-garou. D’ailleurs cette même phrase a fait l’entrée en matière du remake, pour dire. On la retrouve aussi dans Van Helsing, tant qu’on y est, et dans un morceau metalleux que je vous laisse deviner.
 
Le loup-garou, lycanthrope sous sa forme plus savante, et bien je vais vous faire une révélation, c’est un homme qui se transforme en loup ou en une créature mi homme-mi loup, et pas de jeu de mot foireux avec le nom du chien d’un journaliste belge en pantalon de golf, merci. La croyance en l’existence de ces créatures est très ancienne. Vous ne devinerez jamais qui ont été les premiers à causer de l’existence de ces hybrides. Ben ouais, les Egyptiens, personne n’y aurait cru, hein ? Bon, Anubis est formé du loup local, un canidé dont je ne me rappelle plus le nom, mais ce n’est pas un chacal. Pour la transformation d’un homme en loup, je pense que quelqu’un qui avait le Livre des Morts pouvait très bien le faire s’il lui en prenait fantaisie… (je n’ai pas retrouvé de formule spécifique, parmi « se transformer en faucon d’or » ou « se transformer en lotus » mais bon, quand même, il y en a une pour devenir ce qu’on veut alors why not)
http://www.insecula.com/PhotosNew/00/00/04/91/ME0000049112_3.JPG
un loup-garou au Vatican ! en fait une statue d’Anubis d’époque romaine. S’il porte le caducée de Hermès, c’est normal, l’interpretatio graeca est passée par là, et a simplement assimilé les deux divinités, étant tous deux psychopompes. Pour ceux qui ne sauraient pas ce que ça veut dire, ça n’a rien à voir avec un fétichisme des chaussures, c’est le fait de passer les âmes dans l’autre monde.
 
Grecs et Romains parlent d’hommes loups qui n’ont pas besoin d’être des dieux ou des morts pour en arriver là. Pour les Grecs, on a l’ancêtre Lycaon, transformé en loup par Zeus parce qu’il avait été vilain. (une simple accusation d’anthropophagie sur enfançon, rien de bien grave, pourtant), cela rapporté par Ovide mais ils accusaient aussi aisément les voisins s’ils leurs paraissaient louches. Le Satyricon de Pétrone, exemple moultement (ou moumoutement, c’est quand même un sujet poilu) connu, traite à un moment d’un type, un soldat même, parce que, quoi, c’est vrai que ces gens sont louches, qui, au milieu des tombes la nuit s’est foutu à poil en conjurant les astres, s’est transformé en loup et est parti courir le guilledou en hurlant joyeusement. Mais il s’est fait gauler en train d’égorger des moutons, et reprenant au matin sa forme humaine, portait la même blessure que le loup.
Alors depuis, vous pensez si on a entendu parler de gus dans ce genre ! ils ont été très en faveur au Moyen-Age, où c’était une très bonne accusation pour se débarrasser d’un conjoint encombrant.
Ah, tenez, voici les diverses appellations de nos hybrides :
Lycanthrope (homme-loup) pour les Grecs, ou mormolycie ; versipellis (qui change de peau, littéralement) pour les Romains (que du coups si on est versatile on est un peu loup-garou, n’est-ce pas) francisé par Bodin en varios et versipelles : werwolf pour les Allemands… en France, on a pas mal de variantes déjà : garwall pour les Normands, loups-varous en Picardie, bigourne dans le Poitou et la Gironde, libérous en Dordogne (ça veut dire le Lubéron c’est un coin à lycanthropes vous croyez ?), loup-bérou… dans le Berry, bisclaveret en Bretagne… on peut encore ajouter warou, lubin, LUPIN en majuscule, souligné, surligné ce que tu veux, parce que je veux pas faire de spoiler mais Remus Lupin c’est un loup-garou, et c’est direct annoncé dans son nom, t’as vu ?? fausse piste, ça n’avait rien à voir avec la botanique ! Tout simplement parce que lupus, ce n’est pas que la maladie favorite du dr House, c’est d’abord le loup latin. Et si on met au féminin, par contre, c’est une insulte, en gros une accusation de monnayer son affection.
et c’est si il vous faut encore d’autres noms.
 http://www.slashfilm.com/wp/wp-content/images/wolfman-final.jpg
Bref, maintenant que tout le monde a compris, comment devient-on un loup-garou ?
Dans l’Antiquité déjà, ça tenait de la magie. L’autre tordu de soldat a « conjuré les astres », par exemple. Les astres sont par essence associés à l’occultisme à l’époque. Au Moyen-Age, c’était bien sûr du ressort du Diââââble. Diable qui apparemment ne dédaignait pas l’apparence d’un loup pour se montrer à ses fidèles. Seuls les sorciers, acoquinés au Malin pouvaient se permettre ce genre de fantaisie, et ils se faisaient remettre un onguent spécial pour ça. Autrement, on peut compter sur la possession par des démons, qui transforment leurs victimes en bêtes, et pour peu qu’un incube aille tourmenter une donzelle, il peut en résulter la naissance d’un adorable louveteau garou.
Par contre, le Marteau des Sorcières est très clair : le Diable ne peut créer autre chose que de l’illusion, aussi l’aspect des loups-garous en est une, ce qui peut s’avérer très pratique quand on veut accuser quelqu’un qui n’est pas atteint d’hypertrichose (vous savez, l’hyper pilosité qui ont fait des personnes atteintes de ces maladies des freaks montrés dans les foires). Non, parce que voilà, un inquisiteur qui est persuadé du crime lycanthropique d’un type, il serait bien s’il devait prouver que le mec se transforme vraiment. 
Mais ça cadre bien aussi avec la réalité historique : pendant les périodes troublées, genre guerres, qui n’ont pas manquées pendant l’époque médiévale puis moderne, les gens pouvaient se réfugier dans des psychotropes pour oublier la misère quotidienne, et ils se faisaient des onguents avec des tas de trucs pas très nets dedans, genre du suc de belladone, et ils déliraient gravement. Ils s’imaginaient ainsi pouvoir s’envoler sur des balais (quand ils n’opéraient pas de pratique déviante avec), ou bien se transformer en loup… et il y avait aussi l’alimentation, comme ils n’avaient pas assez de blé pour faire leur pain, ils foutaient d’autres graines bizarres dedans, genre toxiques, genre ergot de seigle, qui donnaient des effets hallucinatoires assez forts.
http://www.edwardtbabinski.us/witches/WEREWOLF.JPG
Cranach l’Ancien, au début du XVIe siècle, nous dépeint le loup-garou ordinaire : il égorge, déchiquète et se repaît de chair de préférence fraîche et jeune, c’est un horrible sorcier, un tueur obscène qui répand le mal et la désolation…
D’ailleurs, le qualificatif de loup-garou s’applique à des individus s’adonnant à ce genre de pratique sans que l’on est besoin de les recouvrir de fourrure pour les stigmatiser. C’est le cas de Gilles de Rais, par exemple, psychopathe du XVe siècle qui n’en fut pas moins maréchal de France. Et plutôt pas mal de sa personne, entre parenthèses, en tout cas dans ses portraits pas d’époque (aucune idée de l'artiste ni de la date).http://moovertimes.bplaced.net/MOOVER_Times/MT-PicsOtis/Vampire/gillesderais2.jpg 
 
 
Pourtant, j’ai été assez surprise en découvrant un lai de Marie de France, Bisclavret, datant du XIIe siècle, qui raconte l’histoire d’un loup-garou, certes… mais celui-ci est la victime dans l’affaire. J’ai trouvé ça assez inattendu, à cette époque, de faire du loup-garou un seigneur et un chevalier plein de noblesse, qu’il soit humain ou loup, trahi par la véritable bête sauvage à face toujours humaine, sa femme. Et j’encadre totalement. Voici un lien pour le lire, dans ma grande mansuétude.
http://ecole.du.chiot.free.fr/modules/upload/upload/loup-garou%20002.jpg

 
Et là, vous allez me dire, avec raison : heu… et y’a pas de transmission par morsures ? il se transforme pas qu’à la pleine lune, normalement ? et les balles en argent ? ça sort d’où tout ça ???
 
Et oui, et oui, tout ça, ça vient après. Déjà parce que les balles en argent, on ne pouvait pas les faire quand on n’avait pas d’arme pour les tirer, voyez. Le mythe du loup-garou remonte à loin, et il a continué son bonhomme de chemin ! d’après ce que j’ai pu voir, il y a eu apparemment des accusations de lycanthropies –en France- jusqu’en 1920, si ce n’est plus…
Il semblerait que ce soit au XIXe siècle que la mythologie contemporaine du loup-garou se met vraiment en place. La période romantique s’est fort intéressé à cette vieille croyance, qui lui a permit de s’exalter sur la dualité de l’être, entre l’homme civilisé et le sauvage, la bête dont il provient, sur la solitude de l’être confronté à cette malédiction qui s’opère au clair de lune, dans le cadre de forêts… vous soyez le genre. Georges Sand en parle dans ses Légendes rustiques. Bien entendu, la littérature fantastique du XXe siècle a abondamment apporté sa contribution à ce mythe, ce qui fait qu’aujourd’hui traditionnellement on considère que le loup-garou c’est un type qui s’est fait mordre par un autre loup-garou, qui se transforme à la pleine lune en une créature vicieuse comme l’homme et forte comme la bête, poilue, cruelle et rapide, avec de grandes griffes, une force hors du commun, qui craint l’argent et ne peut se faire tuer que par une balle coulée dans ce métal, de sorte que toute blessure infligée par autre chose sera inefficace et guérira très vite.
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 Ben du coups, Wolfman, c’est ça, c’est le mythe respecté scrupuleusement dans sa plus pure tradition. Je ne trouve pas ça mal, hein, justement, j’ai beaucoup aimé le film, on va dire que c’est un grand classique illustré avec brio. Pas de surprises, mais beaucoup de plaisir et de fun quand même. Et en plus il y a Hugo Weaving qui balade son charisme habituel avec une nonchalance férocement classieuse, avec ça tout est dit.
En plus, quand Lawrence lui dit « ah, c’est vous qui avez bossé sur l’affaire de Jack l’Eventreur », ben c’est pas des carabistouilles. Y’avait bien un inspecteur Frederick Abberline de Scotland Yard. Même, tenez, c’est lui que Johnny Depp incarne dans From Hell.
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Là, comme vous êtes vachement observateur, vous aurez noté que ce n’est pas Johnny Depp mais Hugo Weaving dans le rôle d'Aberline, et que si vous n'aimez pas cette coupe de barbe c'est pourtant celle du vrai inspecteur à l'époque des faits d'éventration sur prostituées.
 
 Ah et donc forcément on est en pleine époque victorienne aussi (derniers crimes de l’Eventreur en 1888), c’est important de le souligner. Pour les costumes, certes, mais aussi parce que ça montre bien le décalage entre cette confiance aveugle qu’on accorde à la Science toute puissante qu’on érige comme compagne de la Raison triomphante, et l’existence, la preuve de ce surnaturel, qui la balaie d’un coups et montre que les vieilles superstitions et croyances considérées obscurantistes ont bien une raison d’être. Car en plus cette science et cette raison ne sont pas moins inhumaines que la créature féroce qui se déchaîne les nuits de pleines lunes.
Ah oui, chose que je trouve amusante. Les réactions devant certaines scènes sont très amusantes. Ainsi, certains peuvent voir des types se faire décapiter, éventrer, éviscérer, trépaner, pendre par les yeux, coupés en deux, torturés avec des petites cuillères, le tout sans broncher, mais alors la seule vue d’une seringue, surtout avec l’aiguille plantée dans la peau plantée dans la peau, les font tressaillir d’horreur et gémir d’angoisse. J’aimerais une explication là dessus, même si j’ai ma petite idée.
Pour en revenir au film, les loups-garous n’étaient pas trop mal fichus, ils étaient surtout très bien habillés, et les poursuites dans la sylve ont tenus leurs promesses. Il y avait du kitsch, mais juste ce qu’il faut. Et ça passait très bien en costume victorien. Le plus réjouissant, c’était quand même les phases d’hallucinations de notre mordu.
Bref, un film que je reverrai avec un grand plaisir, de préférence à la pleine lune comme ce fut le cas cette fois.
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Pour en revenir au mythe du loup-garou, quelque chose qui me chiffonne, c’est cette transmission. Uniquement par morsure. Morsure= salive= fluide corporel non ? ce qui me chiffonne donc c’est que souvent se faire un loup-garou n’a aucune conséquence, alors que la morsure amène la fin du monde. Si on assimile la lycanthropie à une MST, autant aller jusqu’au bout, non ? il me semble que dans Wolf, ça allait dans ce sens. Bon film, dans mes souvenirs.
Mais justement, là est l’explication. On fait passer des choses pour d’autres, à travers des symboles. En l’occurrence, la morsure est un symbole, un euphémisme, pour l’acte sexuel. En tout cas c’est comme ça chez les vampires, en tout cas dans le Dracula de Bram Stoker. Ce livre était d’un érotisme féroce quand il est sorti. Erotisme d’un charme désuet aujourd’hui. Vampires et loups-garous pourraient donc être perçus comme des matérialisations de ces fantasmes, attirants irrésistiblement, mais dont on connaît le danger, et qui, par leur pratique, amènent à la bestialisation, au châtiment divin, à la damnation, visible, honteuse et irréversible, amenant à l’opprobre et au rejet de la société. Au XIXe, c’était la syphilis. Maintenant, bien entendu, notre fléau actuel est le sida, et j’ai déjà entendu parler de cette association à nos deux créatures comme sortes de personnifications de la maladie.
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Il me semble que jadis, la stigmatisation du loup-garou, l’accusation de lycanthropie, matérialisait la crainte qu’on pouvait avoir de ses propres instincts, de sa partie animale refoulée. On avait peur de cet individu qui s’affranchissait de toutes les règles policées de la société humaine, de sa hiérarchie, de sa morale, de ses convenances, pour s’adonner librement à ses pulsions, à ses bas instincts, remettant en cause l’ordre du monde édicté par l’Eglise, et par le gouvernement, éventuellement. La contagion est donc très dangereuse… enfin bon, ça devait être plus au niveau du ressenti que du raisonné. C’est vrai, quoi, débarrassé du fin et fragile verni de la civilisation, l’homme retournerait très vite à l’état animal qu’il n’a jamais vraiment quitté (ça non)
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Le loup-garou est presque toujours représenté comme en détestation complète de son état, dans l’incapacité de contrôler sa forme animale. Une crainte toute humaine ça, perdre le contrôle de soi. Alors que sa forme animale lui donne juste les moyens de faire ce que son vice humain convoite. Et ceux qui aiment leur nature lycanthropique sont encore plus dangereux, car c’est une excellente excuse pour faire le « mal » dont ils rêvent, en conservant une figure de citoyen honnête à côté. Ce qui rappelle ici l’étrange cas du Dr Jekyll et de mr Hyde (que je viens de relire, ce qui m’a rendu ce lien plus évident) ce fantasme de pouvoir séparer les composantes de l’âme humaine en deux : tout le bien dans une partie, tout le mal dans l’autre (et c’est cette partie qui est animale et contrefaite bien sûr), ce fantasme de la dualité kalos kai agathos, ce qui est beau est bien, ce qui est laid est mal, ça ne date pas d’hier, voyez, qu’un physique soit la matérialisation des vertus d’une âme. Et qu’un être puisse être soit un ange, soit un démon. Parce que savoir qu’on est les deux en même temps, y’a pas à dire, ça défrise.
Pourtant, le loup-garou non refoulé, ça serait, l’harmonie d’un être : la Raison et l’Instinct, l’humain et l’animal, libre de ses choix, libre de ses actes, celui qui parcourt les sombres méandres de la forêt de son propre inconscient, où il peut avoir la révélation de lui-même. Cheminement solitaire, dans l’ombre, vers la lumière. Réconcilier les deux. Aller hop, le saint Graal, calice lycanthropique. Perceval, un loup-garou. I’ve made my day.
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Si jamais il y a eu quelqu’un pour aller jusqu’au bout de cette pensée brouillonne et décousue (et délirante) je vous annonce que vous êtes au choix masochiste, ou que vous n’avez rien de mieux à faire, ou bien les deux. Et tant qu’à en être là, autant laisser son avis sur la question, n’est-ce pas ? éclairer charitablement ma lanterne ombreuse ?
 
Allez, Vale, donc, la messe est dite, le vin, le sang, tirés, prêts à être bu au calice de la Dualité, pour l’émergence de la forêt d’Inconscience, dans une fièvre syphilitique où chacun prend son diable par la main pour aller danser sur les ruines.
http://www.illusionsgallery.com/hunt-L.jpgFranz von Stuck, Wild Hunt, 1899 (et en cliquant, autre version)un jour, je ferai un article sur la Chasse Sauvage
 
Ps : Sherlock Holmes : vu et approuvé. Il fallait rester dans l’ambiance XIXe.
Et je me suis aperçue que maintenant, ça se compte en années, le temps que je promet une analyse personnelle et forcément tordue de Peter Pan. Mais ça va venir, je n’ai toujours pas renoncé. J’espère juste que mes théories fumeuses vont me revenir de façon plus consistante que ce nuage brumeux qui me reste à l’esprit. (enfin un nuage brumeux dans lequel flotte complaisamment le Capitaine Crochet, ce qui reste délectable)
 
 
Pour la suite, il risque d’y avoir des révélations sur la démocratie athénienne,. Be ready !

Vendredi 10 août 2007 à 20:02

 

Beaucoup de projets d’articles, tous aussi longs et dépourvus d’intérêts (pour vous chers lecteurs inexistants) les uns que les autres… parmi eux une interprétation de rêve, un commentaire d’une phrase de Henri-Clément Sanson, la liste de ceux à qui j’adresse la phrase « je l’aime » dans une journée (pas moins d’une cinquantaine de fois sur une cinquantaine d’individus (artistes morts la plupart du temps) ou objets différents) l’exhibition gratuite d’une photo de jeune homme à forte capillarité prétexte à un discours très sérieux sur la filiation d’Elrond et partant sur la reproduction chez les elfes (virginité au mariage ? combien de temps de gestation est-il nécessaire pour un enfant elfe ? à quelle fréquence les femmes elfes ont-elles leur cycle ? connaissent elles la ménopause ? ) sujet pas si idiot qu’il n’y paraît et qui a été lancé par la gentille sœur de mon esclave. Aussi en projets, biographies de contemporains de Bleuzenn (on se demande lesquels tiens) une déclaration d’amour à Perceval, exhibition de mes crimes graphiques, exaltations gratuites sur mes peintres fétiches (là encore on se demande lesquels)…
Non, Aujourd’hui il me prend l’envie de traiter d’un thème qui m’est cher, l’Amour et la Mort, Έrwς kaί Qanάtoς LE couple. Ce thème offre de très vastes choix de sujets : le vampirisme, sa plus parfaite illustration, peut-on aimer un mort ? (j’aurais tendance à dire oui je ne sais pas pourquoi) peut-on aimer LA mort ? Là dessus un site très intéressant : la mort dans l’art.
Non, le sous-thème que j’ai envie de traiter ce jour consiste en la décollation de l’amant, et il m’est très cher. J’ai toujours été attirée par cette relation morbide entre une tête coupée et une jeune fille, et mes rêves sont souvent peuplés de ces étoiles filantes au sillage rouge. Rien de pathologique là dedans, c’est avant tout esthétique. Soyez certain que si je voyais vraiment une tête sans son corps, je ne dirais probablement plus ça. D’un aspect purement artistique et de l’ordre de l’idée, c’est esthétique.
 
C’est un thème qui dans l’art apparaît vraisemblablement au XIXeme siècle. Le thème de la décollation de Jean-Baptiste a été traité de tout temps, mais c’est surtout le martyr du saint qui y est souligné, l’aspect prédateur de Salomé étant rarement abordé, hormis peut-être cette magnifique toile de Lucas Cranach, (http://www.wga.hu/art/c/cranach/lucas_e/9/05salome.jpg ) datant de 1530 ,qui évoque plutôt un félin avec sa proie.
 
Pour avoir une petite rétrospective, c’est ici.
 
Cependant, ce n’est vraiment qu’au XIXe siècle que l’on inspire des sentiments amoureux entre Salomé et sa victime. Indéniablement, en ce siècle magnifique pour l’art, les peintres abordent le thème de la décollation de l’amant, de l’attirance fatale et de l’amour impossible et terriblement romantique d’une vivante pour euh, la partie d’un mort.
Ce thème est venu par l’histoire d’Orphée. Au XIXeme siècle, la mythologie gréco-romaine est très à la mode, de part le développement de l’archéologie qui fait redécouvrir les traces du passé, et en cet honneur est joué à Paris l’opéra du compositeur XVIIIeme Gluck, Orphée et Eurydice, qui déchaîne l’imagination des peintres : à la suite de Poussin, qui en avait fait son interpétation en 1650, Emile Levy (1866), Jean-Baptiste Corot (1861), Machard (1865) offrent leur vision du mythe.
C’est là qu’apparaît Gustave Moreau, peintre symboliste que je révère, idolâtre, admire et aime. En 1866, il créer un motif qui va trouver beaucoup de succès : la tête d’Orphée coupée et posée sur sa lyre. Pour ceux qui ne connaissent pas l’histoire du malheureux Orphée, il s’agissait d’un poète (un poète ! ah ! je l’aime ! ^^) qui s’est rendu aux Enfers pour récupérer sa femme Eurydice morte à cause d’un serpent. Il a tant de talent que Hadès lui même se laisse émouvoir (Hadès ! ah ! je l’aime !). Malheureusement pour Orphée il désobéit à l’une des clauses du contrat consistant à ne pas se retourner en chemin pour voir sa femme, et il la perd à jamais. Le chagrin l’étreint, et les bacchantes, ces démentes suivantes du dieu de l’ivresse, jalouses de son talent, et peut-être aussi du fait qu’il ne daignait pas s’intéresser à elles, le mettent littéralement en morceaux. Moreau (ah ! je l’aime !) a ainsi imaginé que la tête du poète s’était posée sur sa lyre, et qu’une jeune fille les recueillait. C’est La jeune fille Thrace. On peut voir sur le tableau qu’elle contemple amoureusement la tête d’Orphée, qu’elle semble bercer, fascinée par ce monde que doivent à présent contempler ces deux yeux clôts.
http://i35.photobucket.com/albums/d172/bloodthirsteve/moreau-thrace.jpg
 
 
Je trouve cela tout simplement magnifique. Ce motif a en tout cas beaucoup plût, puisque que Odilon Redon le reprend en 1880 (symboliste lui même, mais je dois admettre que son art ne m’émeut pas) puis par Jean Delville (que j’aime) en 1893.
Cependant, seul Moreau présente le thème de l’amour mortel dont il est question ici.
http://i35.photobucket.com/albums/d172/bloodthirsteve/delville-orphe.jpg
 
 
Toujours au XIXème, un autre mythe donne aux peintres l’occasion de représenter le thème : celui de Salomé. En 1877, Gustave Flaubert présente trois contes, dont Hérodias, inspiré d’un thème biblique. Celui-ci raconte la vengeance de Hérodiade, femme du roi Hérode, contre saint Jean-Baptiste. Celui-ci dénonçait les frasques de l’épouse, qui n’avait pu obtenir du roi qu’il tue Iaokannan, notre baptiste. Elle fait alors danser sa fille Salomé devant lui, et elle excelle tant à cet exercice que le roi fasciné lui promet ce qu’elle voudra… Salomé obtient ainsi pour sa mère la tête du prisonnier sur un plateau… Pour nos romantiques, il ne fallu pas longtemps avant de penser que Salomé était amoureuse du cousin de Jésus, et que ce n’était que par sa mort qu’elle pouvait le faire sien…
Devinez qui a traité le thème… Moreau ! dans plusieurs toiles présentant toute sa virtuosité il nous a laissé sa vision du mythe, qui semblait fort l’intéresser… Dans l’Apparition, de 1875, Salomé dansant désigne la tête du condamné…
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 Une autre toile montre Salomé dans la prison où saint Jean le baptiste est prêt à se faire décapiter, dans le fond. Elle a l’air troublée, attendant l’instant fatal.
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Il y a, complètement dans le thème, Salomé au jardin, de 1878, où elle contemple la tête avec un air félin de satisfaction. Amour unilatéral et cruel allant jusqu’à la mort de l’homme désiré qui se refuse…
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Moreau a peint d’autres versions de Salomé tenant le plateau, mais dans ces versions, elle regarde ailleurs, mais avec un air de jeune mariée au bras de son époux.
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Je n’ai aucun talent dans l’exégèse, mais je vais donner mon interprétation de ce symbole de l’amant décapité. Il y a d’une part, la découverte d’un amour posthume. La jeune fille tombe amoureuse d’une représentation. Elle n’a devant elle que le vestige d’un être qui a cessé de vivre, elle ne voit qu’une part de lui. C’est une part totalement idéalisée, car l’amant n’est plus en mesure de s’exprimer. Elle projète sur lui ses idéaux sur l’amour, couplés d’une fascination pour la mort qu’il représente aussi. C’est l’éveil de la sensualité chez cette jeune fille qui s’éveille à la vie et à l’amour : ses pulsions de vie, l’amour, se mêlent à ses pulsions de mort (mort de l’amant), représentant la violence de la sexualité, qui l’attire autant qu’elle l’effraie. le tout avec cet espoir encore que l’amour survit à la mort.
 
Le symbole de la tête séparée du corps représente, dans l’onirisme, une coupure nette entre l’esprit et le corps. C’est donc clairement une idéalisation de l’amour, dont on rejète l’aspect purement charnel. On reproche souvent aux femmes, plus particulièrement aux jeunes filles s’éveillant au sentiment amoureux, de vouloir faire dominer dans l’amour cette spiritualité.
Je me retrouve bien dans cet aspect… je n’aime que par morceaux… je n’aime d’une personne que ce que j’en idéalise, et cet idéal n’est qu’une part d’elle… Je n’aime vraiment de tous ceux que je déclare ma flamme à longueur de journée que la tête, l’esprit créateur produisant ce qui m’exalte, le talent, purement spirituel. Je peux aussi m’exalter sur un physique, mais c’est parce que je suis une esthète 0:-), je n’apprécie que la forme, ce n’est encore qu’une part… 
 
Le mythe de Salomé nous laisse voir une autre part, rejoignant un peu la première : la violence du désir, la cruauté de l’amour, quand les pulsions de vie et de morts sont intimement liées… Lorsque l’amant se dérobe, la mort devient la seule façon d’obtenir l’objet du désir. La tête devient alors un trophée, ce siège de la personne, alors offerte. (d’ailleurs les têtes plantées sur des pieux sont des trophées) C’est une appropriation, l’amante frustrée est alors sûre que celui qu’elle aime n’ira pas ailleurs, il lui appartient, éternellement. C’est le paroxysme d’une passion très forte, mais unilatérale, mais aussi très égoïste, puisque l’on refuse que l’être convoité soit heureux sans nous. Au contraire de ce que l’on a vu d’abord, une idéalisation de l’amour et de la personne aimée, on voit ici que cette même idéalisation, déçue, peut amener à la mort. Les sentiments ici ne sont pas candides, mais au contraire plein de force, et même de perversion. C’est une relation sadomasochiste, avec la maîtresse et l’esclave, esclave dont on ôte la vie si il déplaît à sa maîtresse. En même temps l’esclave affirme sa liberté : tu ne m’auras que mort. Triste trophée pour la maîtresse qui ne pourra assouvir que brièvement, et partiellement, la passion qui la dévore. La mort, seule alternative à un amour impossible…

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La version, assez provocante, de Franz von Stuck, datant de 1906
 
Et voici Lucien Lévy-Dhurmer qui nous présente en 1896 un dessin au pastel plein de sensualité, semblant dire « et maintenant, est-ce que tu m’aimes ? »
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J’ai conscience que l’analyse pourrait être bien plus poussée, bien mieux expliquée et beaucoup plus intéressante, mais on ne se refait pas. J’aimerais juste conclure en ajoutant que de mon point de vue, le cavalier Hessois de Sleepy Hollow serait une bonne version du thème, puisqu’il y a bien une jeune fille amoureuse de l’autre côté… bref
 
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Ça ne se voit pas là mais il a la tête coupée
 
Dernière chose : on retrouve aussi ce thème dans le vampirisme. Le vampire est l’incarnation de l’érotisme, de la sexualité débridée voir dangereuse, avec cette violence des passions etc. Or ce vampire est tout de même un damné. Pour le « purifier », lui apporter la paix, il faut lui couper la tête… le vampire incarne la luxure, or la luxure, c’est mal, c’est le côté charnel de l’amour, alors pour le spiritualiser à nouveau… on coupe la tête.
Je ne sais plus si à la fin du Dracula de Francis Ford Coppola Mina embrasse la tête coupée de Dracula…

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