Petit blabla avant de partir retrouver la terre des merveilles, le Saint Graal, ce pays hors du temps dont la magie imprégnant l'air imprègne aussi le corps et l'esprit d'un charme si puissant qu'il le lie à jamais. Doux sortilège en vérité !
Alors… aujourd'hui nous allons nous exalter avec force déviance sur… Eros et Thanatos ! Si ça continue ça va devenir une catégorie à part ^^ Mais c'est un sujet vraiment fascinant s'il en est, du moins si l'on est adepte de la nécrophilie (j'allais écrire nécrofolie… un signe ?) spirituelle. Connaissez vous cette citation ?
‚Denn die Todten reiten schnell'
À savoir
« Car les morts vont vite »
Comme je suis persuadée que vous avez tous lu Bram Stocker vous savez qu'il s'agit d'une citation de Dracula ! Vous savez le passage ou Jonathan Harker se rend au château de Dracula et qu'un mystérieux cocher vient le chercher ?
Et bien cette citation réfère à une autre œuvre suppurant l'amour macabre, avec un mort lui aussi très avenant : il s'agit de la Ballade de Lénore, rédigée par l'Allemand (gage de qualité) Gottfried August Bürger, en 1773. Et oui nous sommes en plein pré-romantisme, et d'ailleurs cette œuvre inspira beaucoup d'artistes de ce mouvement…
Mais que raconte cette ballade ? Je vous enjoins à lire ici la magnifique traduction de Gérard de Nerval. Sinon, je fais un résumé pour les faignasses : il s'agit de l'histoire d'une demoiselle qui attend le retour de son aimé après la guerre de 7 ans (ce qui n'est pas sans me rappeler de bons souvenirs de mon programme d'histoire moderne). Elle voit tous les guerriers revenir, mais, à son désespoir, nulle trace de son Wilhelm ! la malheureuse demoiselle blasphème à force cri et appelle la mort. La nuit venue, des cliquetis d'armure dans l'escalier, et voici Wilhelm se dressant devant elle, qui lui propose de l'emmener de suite pour se marier. S'ensuit une chevauchée fantastique sous la lune blafarde tandis que le cavalier vante la rapidité des morts, puis convie prêtres et pendus à ses noces. Ils finissent par arriver à un cimetière, ou l'armure de Wilhelm tombe, révélant… un squelette. Lénore a juste le temps de se rendre compte qu'elle a chevauché avec la mort qu'elle avait invoqué avant d'y succomber. Ceci me rappelle non seulement Sleepy Hollow (mais comme je suis obsédée par ce film ça n'a rien d'étonnant) mais également quelques vers de Percy Shelley :
« Hasten to the bridal bed
underneath the grave ‘tis spread
oblivion be our coverlid
we may rest, and none forbid”
Ary Scheffer ( <3)donnant sa vision du mythe
Peut-on parler de nécrophilie lorsque ce sont les morts qui font la cours ? Il faut bien entendu considérer que tout cela a été exclusivement fantasmé par des vivants, (ça me paraît difficile autrement) qui imaginent ainsi une nécrophilie passive, autour de la peur du mort malfaisant, qui se fait séducteur fatal afin d'ôter cette vie. Parfois ils se l'approprient (vampires) mais ici on voit que c'est à la suite d'un souhait. J'ai vu lu quelque chose de très intéressant sur les morts malfaisants si vous voulez jeter un œil.(ce n'est pas douloureux) Mais on remarque que dans ces cas de nécrophilies passives, le mort, comme le Diable, se fait séducteur pour arriver à ses fins, il trompe pour obtenir ce qu'il désire.
Il me semble que l'image du cavalier mort est assez significative. On peut y voir une allusion aux plaisirs vénériens (ce à quoi a du tout de suite songer Buf quelques lignes plus haut si elle lit cet article) qui ne peuvent pas vraiment être assouvis avec un cadavre, mais surtout qui ne peuvent être décemment exprimés, et sont le reflet des désirs refoulés que la morale chrétienne ne peut justement tolérer. Il faut donc bien trouver une voie d'expression détournée…
Dans le cas de Lénore c'est encore plus clair : elle désirait ardemment son Wilhelm, et elle l'invite d'ailleurs dans sa couche dès qu'elle le voit. Il n'est donc pas très difficile d'imaginer ce que représente cette chevauchée au clair de lune… l'amant défunt exerce ainsi une puissance érotique très forte : mystérieux, dangereux, traversant les rêves et les fantasmes, oui, il est là, le non-mort, au pied de la couche, il a traversé les limbes de la mort, il est auréolé d'une mystique bien connue : l'amour ne meurt jamais… En plus l'amant mort est quelque peu désinhibé, quoique satanique souvent (bah oui un mort qui n'est pas satanique ne va pas aller embêter les vivants pour leur faire rejoindre le club plus tôt que prévu) ce qui lui donne en plus certains pouvoirs assez excitants. Enfin, c'est mon point de vue n'est ce pas. Les mystères de l'amour mêlés aux mystères de la mort, le tout dans une initiation comme une course nocturne… Remarquez quand-même que fricoter avec ces amants d'outre tombe est nocif pour la santé. (ceci était un communiqué du Ministère des non-morts) Il ne faut pas oublier que l'érotisme est moralement blâmable, il faut donc payer le prix de sa lubricité !
Pas étonnant que les romantiques aient adoré cette histoire… C'est donc le moment d'exhiber quelques toiles ! Je vous aie déjà laissé celles de Vernet et de Scheffer. Mais il se trouve que j'ai eu l'immense joie de voir deux de mes maîtres s'y intéresser également…
Bon aller, on va jouer ! je vous laisse regarder les deux toiles et vous devez me dire qui les a peintes !
omg je me pâme d'emotion!
je ne veux pas dire que c'est évident, mais pas loin ^^
vous gagnerez le droit de me donner le mp3 de la chanson qui illustre cet article ! Comment ça ce n'est pas intéressant ??
En passant, c'est en écoutant cette musique que cette histoire m'est revenue XD undead Casanova et histoires d'étreintes dans des cercueils… forcément…
Sur ce, ite missa est, et si je reviens vous aurez droit à ce que j'avais promis, à savoir divagations diverses et variées sur Peter Pan et mon grand ami le Hessois.
Roh, t'es un vrai puit de science, tu sais ;) je découvre plein de choses grâce à toi!
L'Eros et le Thanatos, ce mélange n'est pas si surprenant si on regarde l'Eros originel, plutôt... violent.