Procédure à suivre pour être un true adorateur de Satan
Le miroir, « vil colifichet de la vanité humaine » d’après le comte Dracula lui même, est inévitablement associé à l’orgueil, à la futilité, et on accuse notamment les femmes de s’y mirer à longueur de temps pour vérifier l’attrait de leur beauté. Beauté maléfique qui n’a bien sûr d’autre but que de perdre les hommes, de les séduire, dans le sens fort du terme, seducere signifiant « faire dévier du droit chemin », selon le discours tenu par les hommes d’église depuis bien longtemps…. Il est bien connu que les femmes sont les créatures du diable, le miroir ne pouvait donc qu’être leur apanage..
« A trop regarder dans le miroir, on finit par y voir le diable »
cette expression populaire montre toute la vanité de l’action de se contempler : à trop y regarder, on se trouve de plus en plus de défauts, et on finit inévitablement par trouver que le reflet qui nous est renvoyé représente un monstre… mais je pense que ceci est quelque chose de plus spécifiquement féminin…
Prenons maintenant ce splendide proverbe médiéval :
« le miroir est le vrai cul du Diable »
comme quoi en se regardant on ne voit rien moins que le fondement du Malin, que l’on se représente au Moye Age comme un visage grimaçant. Ainsi l’action de se contempler est de la dernière vanité, sans parler de son immondice… on peut voir sur une gravure de la fin du Moyen-Age le postérieur démoniaque se refléter dans l’instrument de vanité devant lequel se coiffe une jeune femme à l’air suffisant. La maxime condamne le grave péché d’orgueil que constitue la contemplation de son reflet, et il est bien normal que l’on attribue le miroir au Diable, si connaisseur en ce péché que c’est ce qui lui valut sa chute, dit-on. Pour montrer comme ce péché est abominable, rien de mieux que le fondement de l’Ennemi pour le symboliser…
Ritter vom Turn, 1498
Les sorcières et sorciers de l’époque médiévale et moderne prisaient fort ce fondement, d’ailleurs, du moins selon les fantasmes des divers inquisiteurs et démonologues qui poursuivaient assidûment tous les suppôts de Satan. En effet, on considérait que lors du Sabbat les sorciers embrassaient le fondement du Diable, parfois figuré sous la forme d’un bouc ou d’un chat noir, comme hommage à leur seigneur, et signifier ainsi leur vassalité. (c’est effectivement une parodie du baiser que donnait le seigneur à son vassal lors de la cérémonie de l’hommage de l’époque féodale) : c’est l’osculum infâme.
Parmi ceux accusés de pratiquer cet hommage contre-nature : les bogomiles, vaudois, qui deviendront synonymes de sorcellerie par ailleurs, et autres mouvements hérétiques, parmi lesquels les Templiers qui étaient devenus gênants aux yeux de Philippe le Bel (l’accusation d’hérésie est bien pratique pour se débarrasser des gêneurs)
Ainsi, si on réfléchit bien à tout ce qui vient d’être dit, si vous voulez devenir vassal du Diable, nul besoin d’invocations, de cercles magiques ni de sang versé… il vous suffit d’embrasser dévotement votre miroir… osculum infâme ultime !
Mariana in the South, de Waterhouse, 1897
Edit du 08/06/09 (merci les bugs): mr le Grand Inquisiteur, vous pouvez donc imputer un autre crime à Mordred (private joke)
^^